MEMOIRS OF THE DEVIL"

A show by Miltos Manetas at COSMIC GALLERY in Paris.

Jan-Mar, 2004

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Four Fates Less One.

By Mehdi Belhaj Kacem

 

Si l’amour est une « procédure générique », on serait mieux avisé de dire, parfois, dégénérique, le chiffre trois, même choisi inconscient, livré aux caprices arbitraires des droits, ne peut être innocent. On songe aux Parques, à mettre en boîte, avec la pompe qui s’impose, ce qui n’a pu l’être sur le vif. Parquer les sœurs Filandières, avant que le caprice de l’Une décide que votre crédit court à expiration, et se résolve à trancher le cordon. C’est une fois que c’est fini qu’on accuse le coup de l’évènement. L’art serait donc ici la répétition de trois évènements perdus, perdus d’avance pour certains.

Un peu de poil à gratter lacanien. Si la femme est le phallus de l'homme, ou le symptôme, mais il n'y a de symptôme que la jouissance phallique, la trinité dont Manetas nous offre de parcourir le récapitulé est symptôme, mais de quoi ? De là où évènement et évènement artistique se croisent. L'art est le symptôme du lien rompu avec les Parques, qui les tissent et les brisent à volonté.

Avec le cynisme surjoué qui fait sa réputation, et qui est, comme l'humour, la politesse du désespoir et l'élégance de la probité, Manetas vend la mèche du polichinelle : pour encaisser la plus-value de l'évènement, il faut le répéter cinq, dix, vingt fois. Rentabiliser. Comme il se trouve au moins deux artistes parmi les portraits d'ex dressés, une quatrième fantomatique qui répète l'une des trois, on peut mener l'enquête.

La même probité lui fait dire d'un certain Pierre Joseph qu'il est l'un des plus importants artistes vivants, et que Beecroft ou lui ont commencé par répéter l'évènement constitué par quelques interventions de Joseph, il y a de cela déjà plus d'une dizaine d'années.

Quand Cattelan répète sa galerie voisine, il produit un évènement. Inversement, certaines évènementialisations à outrance tombent à plat, et c'est dans le petit milieu fréquent. Il ne suffit pas par ailleurs de répéter, la quatrième Parque, peut-être, dont le sacrifice consenti permet aux trois autres l'évidence de la métaphore, pour être dans le coup, le coup de l'évènement. Et ce qui me frappe avec Pierre Joseph, le connaissant d'assez près, est son incapacité, pathologique en regard du soucis de rentabilité propre à la plupart des artistes dits contemporains, de répéter ce qu'il a déjà fait ; mais aussi de répéter les procédures propres à son champ, l'équivalent rentier des « notions communes » chères à Spinoza. Manetas, lui, accepte de louer le jeu, le jeu de la répétition, mais cartes sur table, sans être dupe ou nous y transformer, ce qui change tout.

Qui répète qui ? Comment l'hystérie froide et martiale de Beecroft en vient-elle à doubler l'artiste, l'hellène présent, qu'elle a étudié, disséqué, dépiauté à l'université pour frayer sa propre voie (Lachésis ?) ? C'est sans aucun doute ça, la répétition : le meurtre de l'évènement qui l'a fondée.

Nous revenons donc sur les traces de Manetas. Si l'on considère, avec Bourriaud, que l'art moderne, trace sans doute la mort de Dieu, au risque d'indéfiniment la répéter, est intrinsèquement relationnel, alors en effet une métaphysique de la relation, type Deleuze, est appropriée. Si l'on considère, avec moi, que toute Relation est vide, c'est ce vide de la relation qu'il s'agit d'examiner, et comment elle produit ses effets. L'évènement est le mirage existentiel fondamental dont nos mémoires s'empiffrent pour parer au trou fondamental de la Relation. L'ironique est évidemment que ceux-là qui pensent et appellent la Relation de tous leurs vœux, soient aussi bien ceux qui se condamnent à la plus tragique déréliction ; tandis que celui qui pose le vide de la Relation comme telle appelle la persécution de cela seul qui vient la meubler : le phantasme. « Hystérie froide » ne doit donc pas se lire pour une péjoration, ni au laudatif : l'auteur la prend tranquillement à son compte, et se reconnaît davantage dans les parques portraiturées de Manétas, que dans son regard à lui, pour autant qu'il est, pour autant qu'il n'est pas exactement ce regard absent de ce qu'il regarde. Car cette hystérique est exactement ce qui, d'attester l'universel de l'absence de relation, propulse aussi l'universel déferlement imaginaire de ce qui veut la combler.

« Qu'est ce que la vérité ? » demande une nymphette dans un film de Godard. Un vieux briscard qui semble en savoir long, lui répond : « c'est entre apparaître et disparaître ». Du tac au tac elle en conclut : « alors c'est transparaître ? ».

Excellente définition, qui est l'exact inverse de ce que l'idéologie présente appelle transparence : l'apparaître supposé « pur », c'est-à-dire la pornographie. Mais l'arroseur finit toujours par se pisser dessus : rien de plus opaque que certaine esthétique de la transparution supposée « pure ». Manetas sait que la transparence est ce qui se tient dans le vide de la relation, dans l'exact interstice entre apparition et disparition, le trou entre, non pas la présence et l'absence, comme dans toute la philosophie du vingtième siècle, mais entre la présentation et la représentation. C'est ce trou et lui seul qui est présence, vérité. Pas de pornographie ici, la pudeur du réel de la relation. Régler les comptes et faire virer l'esthétique relationnelle en esthétique délationnelle ne sera pas son fait.

Manetas : un sentimental qui s'ignore. On ne fait pas le Deuil des Parques : c'est elle qui en décident.

The Three Fates

Three daughters of Nyx who decided the fates of men and gods alike. Clotho spun the web of life. Lachesis measured its length, and Atropos cut it. Together, they were known as the moerae.

 

 

 

 

The title of the show, is a homage to the book "Memoirs of the Devil" written by director Roger Vadim. Vadim was married to Bridgette Bardot, Jane Fonda and Catherine Deneuve.

 

The Entrance

 

Manifesto with 4 Women , is a remake of a work by Italian artist Alighiero Boetti. In 1969, Boetti made a poster about the artists of his generationEach symbol on that poster was refering to a characteristic of each artist included. Collectors could buy the poster for a low price, however the "code" that would explain the piece was on sale for a very high price and if nobody purchased it before a certain date, it would be destroyed and the decryption would remain secret forever (and that's what happened).

 

Four Rooms

music composed by the British composer Marc Tranmer (Gnac)


 

 

 

 

 

 

PICTURES PRINT QUALITY

If love is a « generic procedure », or we better say a procedure of degeneration, the number three, even if is chosen unconsciously, for capricious reasons that are arbitrary, is not in any case an innocent choice. We attempt to think of the Fates, to rationalize them and celebrate them as we must, but that doesn't happen easily. We must capture the Filandières , sisters before one of them will decide that our credits are about to expire and will cut the string.

It's only after everything will be over that we will recover from the event. In this point, “Art” would be the repetition of the tree lost events, for some of us, lost already in advance.

A Lacanian redness: if the woman is the phallus of the man or the symptom the trinity that Manetas is offering to us is the recapitulation of a symbol but a symbol of what?